Si seulement on pouvait écrire sa vie comme on écrit une fiction. S'il m'était donné la toute-puissance d'une narratrice omnisciente, j'ouvrirais une parenthèse dans ta vie. Dans ton salon, là, maintenant. J'arrêterais le cours de l'histoire pour te demander comment tu vas, réellement.
Un court chapitre, où je prendrais de tes nouvelles.
Je n'ai pas réussi à t'imaginer une autre vie depuis nous. Je suis une narratrice participante, pas omnisciente. Quand je ne suis pas là, je ne sais pas. Et dans ta vie, depuis quatre ans, je ne suis plus là. Peut-être y es-tu parvenu, toi, à te réécrire. Peut-être as-tu commencé une nouvelle histoire. Dans un carnet tout neuf. Avec un beau stylo. Peut-être y a-t-il plus de personnages que je n'en connais dans ton histoire.
Je redoute que tu sois seul. Trop seul. J'ai peur que tu n'aies personne à qui parler. Peur que tu passes tes journées dans ton appartement à ne parler à personne. J'ai peur que tes seuls contacts sociaux soient avec la gentille caissière de l'épicerie quand tu sors faire tes courses. À qui racontes-tu ta journée de télétravail? Y a-t-il une main sur ton épaule? Est-ce que la chaleur d'un corps contre le tien te rappelle que tu vis? Que tu vaux?
Les derniers mois ont été très durs. Spécialement pour les personnes seules.
Mais aussi pour celles qui aiment des personnes seules dont elles n'ont plus de nouvelles.
Alors je t'en prie, dis-moi comment tu vas...
